vendredi 6 février 2009

Pauvre Marc L***

Marc L*** est desormais la (tristement) célèbre victime du magazine "Le tigre", ou plus précisemment, la victime de sa propre négligence à laisser trainer des informations sur lui sur internet. Mais Marc L*** ça pourrait être chacun d'entre nous.

Afin de démontrer le danger à laisser des informations disséminées un peu partout sur la toile, le Tigre a publié un article dans son numéro novembre-décembre 2008 où il s'est employé à retracer la vie d'un anonyme seulement à partir des informations trouvées sur internet. Marc L*** a donc été le grand gagnant de cette dure loterie, et le journaliste a pu " pointer le doigt sur les risques de la confusion vie privée/vie publique dans l’usage d’internet, risques que la CNIL signalait depuis longtemps." Nous avons donc découvert tout ou presque de sa vie, son travail, ses histoires sentimentales, ses voyages, ses passions... Avec dates, noms de lieux et personnes (seuls les noms de famille ont été ***). Des passages :

"Alors, Marc. Belle gueule, les cheveux mi-longs, le visage fin et de grands yeux curieux. Je parle de la photo prise au Starbuck’s Café de Montréal, lors de ton voyage au Canada, avec Helena et Jose, le 5 août 2008. La soirée avait l’air sympa, comme d’ailleurs tout le week-end que vous avez passé à Vancouver. (...) Vous avez loué un scooter, vous êtes allés au bord de la mer, mais vous ne vous êtes pas baignés, juste traîné sur la plage. En tout, tu as passé un mois au Canada. Au début tu étais seul, à l’hôtel Central, à Montréal (série de photos « autour de mon hôtel »). Tu étais là-bas pour le travail. Le travail ? Tu es assistant au « service d’architecture intérieur », dans un gros cabinet d’architectes, LBA, depuis septembre dernier (Facebook, rubrique Profil). (...). Le 21 août, c’est Steven qui t’a accompagné à l’aéroport. Retour en France, où t’attendait un mariage (Juliette et Dominique), puis, la semaine suivante, le baptême de ta nièce, Lola, la petite sœur de Luc (qui fait des têtes rigolotes avec ses grosses lunettes), à Libourne.
Revenons à toi. Tu es célibataire et hétérosexuel (Facebook). Au printemps 2008, tu as eu une histoire avec Claudia R***, qui travaille au Centre culturel franco-autrichien de Bordeaux (je ne l’ai pas retrouvée tout de suite, à cause du caractère ü qu’il faut écrire ue pour Google). En tout cas, je confirme, elle est charmante, petits seins, cheveux courts, jolies jambes. (...). Ce 31 mai, vous avez une façon de vous enlacer qui ne laisse que peu de doutes. Et le 22 juin, cette fois c’est sûr, vous vous tenez par la main lors d’une petite promenade au Cap-Ferret. C’est la dernière fois que j’ai eu des nouvelles de Claudia. (...) Avant Claudia, tu étais avec Jennifer (ça a duré au moins deux ans), qui s’intéressait à l’art contemporain (vous avez visité ensemble Beaubourg puis tu l’as emmenée au concert de Madonna à Bercy). Elle a habité successivement Angers puis Metz, son chat s’appelle Lula, et, physiquement, elle a un peu le même genre que Claudia. À l’été 2006, vous êtes partis dans un camping à Pornic, dans une Golf blanche. La côte Atlantique, puis la Bretagne intérieure. Tu avais les cheveux courts, à l’époque, ça t’allait moins bien."

L'article entier est à lire, mais réellement effrayant. J'aime beaucoup le style du journaliste, on hésite entre un spectateur un peu ironique et un serial killeur suivant les traces de sa future victime. Toujours est-il qu'il est très facile de retrouver des informations sur n'importe qui sur internet. Dans "La machine internet", Michel Bera et Eric Méchoulan en 1999 comparait déjà internet à un grenier de données où sont répertoriés, classés et fichés les individus comme jamais auparavant. Le philosophe Alain Finkielkraut dans "Internet l'inquiétante extase : fatale liberté", annonce la fin au droit d'exister sans laisser de traces, la fin du droit à la discrétion. Dans notre quête à vouloir se faire (re)connaître du plus grand nombre, nous oublions facilement que cela peut se retourner contre nous.

Voilà, nous le savions déjà un peu, mais cet article m'a quand même bien retournée. Car nous savons très bien que quelque part, nous sommes tous des Marc L***.

L'article :
http://www.le-tigre.net/Marc-L.html

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Oh mon Dieu, ils pourraient tout savoir de ma vie !

(...)

Heureusement pour moi, ils ne trouveront pas grand chose ...

Liath a dit…

D'où l'intérêt de "jouer un rôle" sur le net.
Ça permet de "brouiller les pistes" (sans tomber dans la parano non plus hein), de paraître autrement que ce que l'on est réellement.

Et puis je pense qu'il y a certaines règles élémentaires de confidentialité à respecter: ne jamais donner de données personnelles dans des parties "publiques" du net, préférer les parties privées avec accès par mot de passe, jouer un "rôle" un poil (bleu) différent du votre, faire un tour dans le menu "Paramètres -> Confidentialité" de Facebook, cacher ses photos persos (encore une fois, sur Facebook on peut définir des droits d'accès), éviter de multiplier les contacts avec des gens que l'on ne connait pas et surtout être méfiant.

Il ne faut pas non plus devenir complètement parano, mais faire un minimum attention à ce que l'on dit, écrit, ou publie me semble être le minimum vital sur internet.

Quant au fait de retrouver des infos très facilement sur le net, je pense que ma petite démo de l'autre fois en est une bonne preuve ^^'

Liath a dit…

Y'a plus rien à lire ici, snif...
Dommage je l'aimais bien ce blog moi... :/

Identity None a dit…

hé hé désolée mais avec la rédaction de mes mémoires pour mon projet j'ai eu très peu de temps, mais promis je recommence cette semaine :)